octobre 8, 2024

Frédérique Vidal a franchi la ligne rouge la recherche publique et les libertés académiques sont en danger !

Dans une interview donnée sur Cnews le 14 février, la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation s’est illustrée par des propos stigmatisant la communauté universitaire. Elle a en effet repris à son compte les affirmations du gouvernement, en particulier du ministre de l’Education nationale Jean-Marie Blanquer, et de la droite, sur une prétendue emprise de « l’islamo-gauchisme » à l’université. Elle affirme ainsi : « Ce qu’on observe à l’université, c’est que des gens peuvent utiliser leurs titres et l’aura qu’ils ont. Ils sont minoritaires et certains le font pour porter des idées radicales ou des idées militantes de l’islamogauchisme en regardant toujours tout par le prisme de leur volonté de diviser, de fracturer, de désigner l’ennemi, etc… ». 

Madame Vidal n’a-t-elle pas d’autres priorités actuellement que de désigner des ennemis intérieurs parmi les personnels de son ministère ? Quel bilan de son action face à la détresse étudiante ? Quel bilan de la mise en place de la loi de programmation de la recherche (LPR), votée à la faveur de la pandémie malgré l’opposition de la majorité des personnels ? Les mesures répressives mises en place par la LPR ne suffisent-elles pas à mettre au pas la recherche française ? Dans cette interview, elle vante l’évaluation par les pairs… qu’elle remet en question dans la LPR avec la fin de la qualification par le Conseil national des universités. Madame Vidal ne devrait-elle pas au contraire prendre la défense de collègues attaqués dans les médias et sur les réseaux sociaux par la droite et l’extrême droite, comme le rappelle la CGT FERC Sup dans son communiqué ?

Elle enchaîne dans cette interview en annonçant : « On ne peut pas interdire toute approche critique à l’université. Moi c’est ça que je vais évidemment défendre et c’est pour ça que je vais demander notamment au CNRS de faire une enquête sur l’ensemble des courants de recherche sur ces sujets dans l’université de manière à ce qu’on puisse distinguer de ce qui relève de la recherche académique de ce qui relève justement du militantisme et de l’opinion. ». Faut-il rappeler à Madame la ministre que toutes les recherches menées dans les établissements publics (organismes nationaux, écoles et universités) sont soumis à l’évaluation par des comités scientifiques internationaux ? La liberté de la recherche est indispensable pour comprendre le monde dans lequel nous vivons. C’est le propre de la recherche de confronter les idées. Madame la ministre voudrait-elle uniquement entendre les idées qui la confortent dans sa politique ?

Bien qu’elle s’en défende, il s’agit là d’une menace ouverte contre la liberté académique et la liberté d’opinion, qui est précisément un fondement de la recherche et de la laïcité. Rappelons que les scientifiques doivent pouvoir mener leurs recherches indépendamment des pressions politiques, et qu’avoir des opinions n’invalide en rien les résultats scientifiques obtenus. Rappelons également que les chercheur.ses, comme tous les fonctionnaires, bénéficient de la liberté d’opinion. La remise en cause de ces deux principes pourrait avoir des conséquences au-delà des sciences sociales, en termes de droits syndicaux, de recherche en sciences de l’environnement etc. Le 16 février, le ministère précise que l’enquête sera confiée à L’alliance thématique nationale des sciences humaines et sociales (Athéna) dont le vice-président est le PDG du CNRS.

Cette déclaration est à restituer dans le contexte général de restriction des libertés publiques, notamment avec la loi sécurité globale et la loi sur le séparatisme. Alors que les inégalités se creusent de plus en plus dans le pays et que les plans de licenciement se multiplient, alors que le gouvernement ne cesse de donner des gages aux patrons, au mépris de la lutte contre la pandémie et ses conséquences sociales, il tente de désigner un ennemi intérieur, de « diviser pour mieux régner ». 

Le SNTRS-CGT dénonce les propos de Madame Vidal contre les libertés académiques ; il est fermement engagé dans la lutte contre toutes les discriminations, contre le racisme et pour la défense de la laïcité et combattra, si nécessaire, jusqu’à l’abandon de ce nouveau projet du gouvernement de chasse aux sorcières.